De l’auto-édition au monde de l’édition : le jardin secret de Coralie Raphaël

« Ce sont les auteurs de littérature populaire qui gardent les librairies ouvertes et les maisons d’édition vivantes, en leur permettant de prendre des risques sur d’autres auteurs avec lesquels elles vont probablement perdre de l’argent. »

 

Lorsque je rencontre des profanes et néophytes qui ont achevé un manuscrit et souhaitent gravir ce que j’aime appeler la « montagne du monde de l’édition », j’ai un plaisir immense à les orienter vers Coralie Raphaël, que j’ai rencontrée via les réseaux sociaux il y a deux ans maintenant. Blogueuse et autrice auto-éditée dont j’ai lu les deux livres, Le Jardin Secret de Marie et Ceux qui s’aiment, Coralie est une Française installée au Québec. Elle a développé une véritable expertise autour de tout ce qui touche à la publication, et l’on peut suivre son travail sur Twitter, sur son blog, ainsi qu’à travers sa newsletter. Très admirative du bon sens, de l’optimisme prudent et du pragmatisme avec lesquels elle aborde un domaine qui suscite énormément de fantasmes, je suis ravie de pouvoir l’interviewer, et vous la présenter. C’est avec la disponibilité et le professionnalisme qui la caractérisent qu’elle a répondu à mes questions.

Coralie, la blogosphère littéraire te connaît pour tes livres, mais notamment et aussi pour ton blog et tes articles, dans lesquels tu nous dévoiles les dessous du monde de l’édition. Pourrais-tu te présenter ?

Je suis blogueuse et autrice indépendante depuis 4 ans. Je m’intéresse à l’édition et l’autoédition, au marketing numérique, à l’e-commerce, etc. J’ai eu l’occasion de travailler avec diverses plateformes d’autoédition, des éditrices, et j’essaie de rester informée sur l’évolution de l’industrie du livre.

Comment analyserais-tu le regard que tu portes sur le domaine de l’édition ? Est-ce que le fait de vivre à l’étranger participe de ce recul ?

J’ai un regard encore neuf et émerveillé, mais sans être naïve sur le domaine de l’édition. Je pense savoir beaucoup de choses sur les différentes façons de publier un livre, mais comme pour tout, on n’a jamais fini d’apprendre. C’est un sujet complexe qui se cache derrière de faux airs de simplicité (écrire un livre remarquable et cibler le bon marché). Je peux discuter pendant des heures et des heures sur la façon de publier un livre, et j’ai un immense plaisir à toujours mieux comprendre ce processus.

J’essaie de suivre l’évolution de l’industrie, car je pense qu’on devient amer quand on se sent victime d’un changement qu’on n’a pas réussi à anticiper. Je veux rester émerveillée et ne pas connaître cette amertume alors je fais de mon mieux pour prendre ma carrière en main, être proactive et dans une dynamique de partenariat avec ceux qui m’entourent pour ne pas tomber dans le piège de la dépendance.

Concernant le recul, c’est vrai que la distance aide. Mais je pense que mon recul vient surtout du fait que, pour l’instant, je ne cherche pas à vivre de mon écriture. Les livres et le blog me permettent avant tout de m’épanouir et de faire de belles rencontres. Pour l’instant, c’est ce qui compte le plus pour moi. Ça changera peut-être quand j’aurai plus de temps à y consacrer, quand mes enfants seront plus grands.

J’ai le sentiment qu’en France, on a tendance à hiérarchiser les auteurs et les maisons d’édition : il y a les romanciers, les essayistes, les auteurs jeunesse, il y a les grandes maisons, les plus petites maisons d’édition, les auteurs auto-édités ? Est-ce un avis que tu partages ?

Oui, c’est un avis que je partage. La profession est souvent cantonnée dans de petites cases et ça s’accompagne souvent d’un dédain pour l’auteur jeunesse, l’auteur autoédité… Alors quand tu es les deux… (Rires) J’y suis forcément sensible et je n’ai pas oublié cet article d’Antoine Dole qui témoigne du mépris auquel il a fait face de la part d’éditeur, d’organisateur de salon, de professeur d’école, de journaliste, d’auteurs de « vraie » littérature…

Il y a un certain snobisme dans le milieu littéraire français. La littérature populaire y est boudée par les critiques et les prix alors qu’elle est plébiscitée par les lecteurs. Je trouve ce mépris irrespectueux à la fois pour les auteurs et pour les lecteurs. Et puis il faut faire preuve d’honnêteté : ce sont les auteurs de littérature populaire qui gardent les librairies ouvertes et les maisons d’édition vivantes, en leur permettant de prendre des risques sur d’autres auteurs avec lesquels elles vont probablement perdre de l’argent. Qu’on le veuille ou non, ce sont les locomotives de l’industrie.

Aujourd’hui, de plus en plus d’auteurs tentent de se faire entendre, et exigent notamment une plus grande transparence quant à leurs ventes et au versement de leurs revenus. L’auto-édition se développe, l’on voit qu’un Joël Dicker fonde sa propre structure. As-tu le sentiment que les choses bougent, ou pas du tout ? Galligrasseuil pourrait-il, dans les années à venir, voir son hégémonie menacée ?

Les choses bougent du côté des petites structures. Exemplaire, la maison d’édition créée récemment par l’autrice et dessinatrice Lisa Mandel, promet à ses auteurs de 20 % à 70 % des droits sur la vente de leurs livres (là où les contrats habituels leur en concèdent de 8 % à 12 %). En retour, elle invite l’auteur à s’impliquer dans certaines étapes et le remet ainsi au centre de la chaîne de production. Monstrograph, petite structure fondée par les écrivains Martin Page et Coline Pierré, et qui publie depuis 2015 des livres « bizarres », des « essais intimes et iconoclastes » engagés, est à l’origine d’un des succès de la rentrée 2020, l’essai féministe Moi les hommes, je les déteste, de Pauline Harmange. Joël Dicker a annoncé qu’il va fonder sa propre structure et à l’heure où j’écris ces lignes, Arnaud Nourry vient d’être démis de ses fonctions à la tête de Hachette Livre par Arnaud Lagardère sur fond de désaccord sur le devenir de l’entreprise convoitée depuis des mois par Vincent Bolloré. Ces deux derniers événements sont à surveiller, car ils peuvent apporter d’importants changements.

En revanche, je ne pense pas que l’hégémonie de Galligrasseuil soit menacée. Les auteurs auront toujours une bonne raison de signer avec une maison d’édition. Dans le cas de Galligrasseuil, la raison est souvent le prestige recherché, parfois la légitimité, avoir son livre dans les rayons des librairies…

Connais-tu le monde de l’édition québécois ou canadien ? Si oui, en quoi diffère-t-il de l’édition française ?

Je connais mal le monde de l’édition québécois mais je pense qu’on trouve moins ici cette surproduction de livres qu’on voit en France. Quand tu entres dans une librairie au Québec, tu vois beaucoup de livres français. Ça fait longtemps que les éditeurs français, Hachette en tête, ont compris qu’il y avait un marché intéressant ici. En revanche, c’est plus difficile de trouver des livres québécois dans une librairie française. Il y a bien des romans d’ici qui arrivent parfois jusqu’en France en étant réédités par des maisons parisiennes qui en achètent les droits, mais on ne connaît pas la maison québécoise à l’origine du livre. Mais il y a quelques maisons qui depuis trois ou quatre ans ont cessé de céder les droits pour amener elles-mêmes leurs livres dans les rayons des librairies européennes francophones. Je pense aux Éditions du remue-ménage, celles du Quartanier (qui avait publié L’année la plus longue, de Daniel Grenier, qu’on a retrouvé un an plus tard chez Flammarion), Mémoire d’encrier et La Peuplade… Et elles ont fait ça au bon moment, car il y a un intérêt européen pour la littérature québécoise. Donc plutôt que d’amputer leurs catalogues de certains titres à fort potentiel de vente en vendant les droits, les maisons québécoises s’en servent pour favoriser leur implantation en Europe. Ça leur évite des inquiétudes du genre : l’éditeur français défendra-t-il bien le livre ? Acquerra-t-il le suivant du même auteur ? Ça leur évite aussi de devoir faire leur preuve aux yeux des éditeurs français qui sont déjà submergés par la production nationale.

Ça leur demande un certain investissement et une certaine prise de risques mais quand le succès est au rendez-vous, ça leur rapporte bien plus que la vente de droits.

Tu as écrit un roman jeunesse, Le Jardin Secret de Marie, dont j’ai particulièrement apprécié la langue travaillée – tu cites d’ailleurs Marcel Pagnol, à ce sujet, sur ton blog. Comment en es-tu venue à l’écriture ? Quels classiques t’ont marquée ?

Comme pour beaucoup d’autres auteurs, par la lecture. J’ai été fascinée très tôt par la capacité qu’a la langue de donner corps à l’imaginaire, d’ouvrir, de construire, ou de poser des mondes dans lesquels le lecteur évolue. Rien ne me semblait plus magique à dix ans, et c’est toujours le cas. À cette époque, je rêvais de devenir autrice. Ensuite, cette idée m’est sortie de la tête. J’adorais écrire, mais pas de la fiction. J’avais lu Le journal d’Anne Frank et je voulais tenir, moi aussi, un journal intime. Au collège, on m’a offert Jane Eyre. Je n’avais jamais lu de roman habité par une telle héroïne. Puis j’ai lu Une vie et Bel-Ami et le roman d’apprentissage est devenu mon genre littéraire favori. Plus jeune, j’ai fait quelques tentatives d’écriture vite abandonnées car trop ambitieuses. Et puis, en 2017, quelques mois après la naissance de ma fille, j’ai décidé de me lancer pour de bon ; j’avais peur qu’on ne voie plus qu’une mère en moi.

Tu aimes indéniablement fédérer, rendre service et permettre au plus grand nombre de bénéficier de ton expérience. Comment ce désir de diversifier tes activités est-il né ? As-tu des projets actuels, ou immédiats, dont tu aimerais nous parler ?

J’avais envie de pouvoir m’exprimer, prendre l’habitude d’une discipline d’écriture, partager mes expériences et d’avoir un lieu pour interargir sans l’immédiateté des réseaux sociaux. Qu’il y ait de la réciprocité mais que si les autres le voulaient.

J’ai plusieurs projets de roman, mais le plus avancé est un roman de science-fiction. J’écris tous les jours mais pas autant que je le voudrais car mes enfants sont encore jeunes. Passer du temps avec eux est ma priorité, j’écrirai plus, plus tard.

Enfin, pour finir, quel regard portes-tu sur des initiatives comme Un Texte Un Jour ?

J’aurais vraiment aimé avoir accès à une telle application dans mon adolescence ! Je lisais beaucoup donc pas pour me donner envie de lire plus mais pour m’accompagner dans mes découvertes. J’aime la façon singulière dont Un Texte Un Jour aborde la littérature classique, en présentant des œuvres, des thématiques ou des problématiques précises. À quand une application sur la littérature japonaise classique ?

Pour en savoir plus sur Coralie, découvrez son blog, riche de ressources précieuses sur l’édition et l’auto-édition.

Napoléon Ier dans la littérature du XIXe siècle : 15 textes à relire sur les applications « Un texte Un jour » et « Un texte Une femme »

Des Misérables de Victor Hugo à La Guerre et La Paix de Léon Tolstoï en passant par Le Rouge et le Noir de Stendhal, plusieurs grandes œuvres du XIXe siècle évoquent Napoléon Ier et ont contribué à sa légende.

En ce 5 mai 2021 où nous fêtons le bicentenaire de la mort de Napoléon, nous vous présentons ces auteurs et textes consacrés à l’empereur que vous pouvez retrouver sur les applications Un texte Un jour et Un texte Une femme.

Vous pouvez également relire deux lettres de Napoléon à Joséphine de Beauharnais sur Un texte Un jour, et un texte de Joséphine de Beauharnais sur Un texte Une femme.

Chateaubriand : « Buonaparte est un faux grand homme : la magnanimité, qui fait les héros et les véritables rois, lui manque. »

Chateaubriand, noble et royaliste convaincu, vouait une haine tenace à l’empereur. Dans son pamphlet De Buonaparte et des Bourbons, Chateaubriand nous brosse un portrait particulièrement sévère du personnage, et il revient également sur la Révolution française par laquelle, selon lui, tout a commencé.

Dans Mémoires d’outre-tombe, Chateaubriand rappelle, par-delà le mythe, les conséquences, souvent méconnues, des campagnes de Napoléon au début du siècle.

3 textes de Chateaubriand consacrés à Napoléon sont à relire sur l’application Un texte Un jour.

Germaine de Staël : « Un autre symptôme de la malveillance de Bonaparte envers moi, ce fut la manière dont les journaux français traitèrent mon roman. »

Les salons littéraires comme ses propres écrits furent pour Mme de Staël l’occasion de diffuser ses idées, libérales, sociales (elle réclame le droit au divorce), religieuses ou même esthétiques. Ses opinions, qui allaient à l’encontre du nouveau régime, inquiétèrent l’empereur Napoléon Ier qui présenta dans ses mémoires Mme de Staël comme une « folle, coquine, corbeau, tricoteuse de faux-bruits ». Mme de Staël refusa de prêter allégeance à l’absolutisme, et l’inimitié grandit entre les deux personnages. À force de faire entendre une voix dissonante, la fille de Jacques Necker fut condamnée à l’exil en 1803.

Publié à titre posthume, Dix années d’exil retrace les années d’interdiction de séjour de Mme de Staël à Paris. L’autrice y déconstruit, non sans fougue, le mythe napoléonien.

7 extraits de Dix années d’exil sont à relire sur Un texte Une femme et 2 extraits s’attaquent frontalement à la figure de l’empereur.

Stendhal : « Figurez-vous tout un peuple amoureux fou. Peu de jours après, Napoléon gagna la bataille de Marengo. »

Napoléon hante les deux plus grands romans de Stendhal, Le Rouge et le Noir et La Chartreuse de Parme.

Le Rouge et le Noir a pour héros Julien Sorel, le fils d’un charpentier jurassien, qui cache une forte personnalité derrière un physique sensible et délicat de jeune premier romantique. Admirateur éperdu de Napoléon, Julien, qui n’a pour expériences que ses lectures, est animé de rêves bien trop grands pour la petite ville dans laquelle il vit. Il lit en cachette Le Mémorial de Sainte-Hélène.

1 extrait crucial du Rouge et le Noir, intitulé « Le Mémorial de Sainte-Hélène », est à relire sur l’application Un texte Un jour.

Dans La Chartreuse de Parme, nous suivons l’audacieux Fabrice del Dongo qui décide, par admiration pour Napoléon, de rejoindre le champ de bataille de Waterloo. À travers les yeux de son héros Fabrice del Dongo, la geste napoléonienne nous est décrite comme un indescriptible chaos. On retrouve aussi un autre extrait dans lequel Stendhal, au début du roman, dit retrace la liesse qui s’empara de certains Italiens lorsque le général Bonaparte entra dans Milan, dans une Italie troublée politiquement.

Ces 2 extraits sont à relire sur l’application Un texte Un jour.

Alexandre Dumas : « La vision gigantesque était évanouie. »

Natif de Villers-Cotterêts, Alexandre Dumas raconte, dans ses mémoires, le passage de Napoléon Ier dans sa ville natale, les 20 mars 1815, pour se rendre à Waterloo. L’extrait témoigne de la fascination de l’écrivain pour l’empereur, mais aussi de la solennité de ce moment.

Le 20 juin 1815, de retour en France après la défaite  de Waterloo, Napoléon Ier repasse par Villers- Cotterêts. L’écrivain, qui avait déjà aperçu l’empereur à l’aller, sur le chemin de Waterloo, narre une ambiance désormais tout autre.

Ces 2 extraits sont à relire sur l’application Un texte Un jour.

Victor Hugo : « Le champ de Waterloo aujourd’hui a le calme qui appartient à la terre ».

Le 18 juin 1815, la bataille de Waterloo marqua la défaite sans appel d’un Napoléon revenu de l’île d’Elbe face aux Anglais et aux Prussiens. Soixante-deux mille soldats décédèrent en quelques heures et l’événement scella les destins de l’Europe monarchique et de la France post-révolutionnaire. Dans Les Misérables, près de cinquante ans après les faits, Victor Hugo revient sur cet « effrayant 18 juin ».

Cet extrait des Misérables est à relire sur l’application Un texte Un jour.

Léon Tolstoï « : « Parce que Napoléon était un ambitieux ».

Monument de la littérature, La Guerre et La Paix exploite l’histoire individuelle pour dépeindre une Russie au bord d’un conflit apocalyptique avec la France de Napoléon. Entre amour, engagement militaire ou intellectuel, ses jeunes héros tentent de trouver un sens à leur existence, et Tolstoï parvient à établir un lien constant, et manifeste, entre le personnel et le politique. Dans le roman, Léon Tolstoï revient sur les raisons de l’invasion de la Russie par Napoléon en 1812.

Cet extrait est relire sur l’application Un texte Un jour.

Napoléon Ier : « Il ne dépend de personne de m’obliger à te survivre ».

Si l’on connaît le stratège hors-pair qu’était Napoléon, on oublie trop souvent que ce dernier était un styliste remarquable, et sa correspondance, très riche, fut publiée sur ordre de Napoléon III. Les lettres à Joséphine brossent le portrait d’un homme très amoureux.

2 lettres de Napoléon à Joséphine sont à relire sur l’application Un texte Un jour.

 

Vous souhaitez découvrir ces 15 textes ? N’attendez plus pour télécharger nos applications Un texte Un jour et Un texte Une femme. Un texte Une femme et Un texte Un jour existent aussi en version papier, publié chez Libriphaera.

Sur Un texte Une femme, vous pourrez également découvrir un texte de Joséphine de Beauharnais, accompagné d’une biographie.

 

Bonaparte à la bataille d’Arcole le 27 brumaire an V, estampe de Le-Gros à retrouver sur Gallica