Pourquoi « Demain, dès l’Aube » est-il un poème universel ?

« Demain, dès l’aube, à l’heure où blanchit la campagne, /Je partirai. Vois-tu, je sais que tu m’attends. » Tout le monde connaît les premiers vers de ce poème de Victor Hugo que vous pouvez retrouver au sein de nos applications Un texte Un jour et Un Poème Un Jour.

« Demain, dès l’Aube » est le poème le plus célèbre de Victor Hugo, et probablement un des poèmes les plus connus de la littérature française. Pourquoi ?

Un père qui s’adresse à sa fille

Rappelons le contexte dans lequel le poète écrit ce poème. Victor Hugo, terrassé par la disparition de sa fille Léopoldine, lui dédie le livre IV des ContemplationsPauca meae (littéralement « Quelques vers pour la mienne »).  Tout le livre IV est littéralement hanté par la figure de Léopoldine.

Si ce poème ne fait pas exception, « Demain, dès l’Aube » est un peu particulier.

Un poème universel

C’est un poème qui relate une promenade, celle d’un marcheur. Ce marcheur est Hugo qui se rend à Villequier, sur la tombe de sa fille, et cette marche lui prend la journée, partant de « demain dès l’aube » jusqu’au « soir ». Aucun nom propre, aucune indication géographique ne sont mentionnés. Si l’on ne connaît pas la vie personnelle de Hugo, il est seulement question d’un marcheur, qui traverse la nature, qui entreprend un long chemin pour rejoindre une tombe. C’est un « je » qui parle à un « tu », et tout le monde peut s’identifier à ce marcheur et à sa douleur. C’est un poème universel.

Un poème pudique

A aucun moment, et c’est le tour de force de ce poème, il n’est question de termes de souffrance hormis un seul adjectif, « Triste » ! Mais l’attitude du marcheur (« le dos courbé, les mains croisées, »), son indifférence face à la nature qui l’entoure témoignent superbement de son malheur.

Un poème simple à mémoriser

Autre tour de force de ce poème, les mots choisis par le poète sont extrêmement simples et ordinaires. Ce vocabulaire dépouillé suggère l’idée que le marcheur n’a pas le courage d’en dire plus. Mais surtout, cela fait de « Demain, dès l’Aube » un texte facile à mémoriser, et à transmettre. Faites un rapide sondage autour de vous, rares sont ceux qui ne se souviennent pas, même vaguement, de « Demain, dès l’Aube » !

Une fin bouleversante

Le dernier vers du poème indique que le marcheur dépose sur la tombe un bouquet qu’il a probablement constitué au cours de sa promenade. Les fleurs incarnent le renouveau et l’idée que la vie, plus que tout, doit reprendre le dessus !

Vous souhaitez relire « Demain, dès l’Aube » et d’autres poèmes de Victor Hugo ? Téléchargez nos applications Un texte Un jour et Un Poème Un Jour !

Illustration : Wind River Country d’Albert Bierstadt (peintre américain, 1830-1902)

 

 

 

Qui est le père biologique de Cosette ?

« Je n’ai jamais aimé que les hommes cruels. Les hommes gentils, c’est triste, mais on ne les aime pas. » Louise Brooks

Si Jean Valjean est la figure paternelle constamment évoquée dans Les Misérables, l’on oublie bien souvent que Victor Hugo relate la rencontre de Fantine avec le père de Cosette. Cette dernière a donc un père, qui ignore tout de son existence et ne l’a jamais reconnue. Mais avant d’évoquer le cas Félix Tholomyès, puisque tel est le nom du père biologique de Cosette, revenons sur le parcours de Fantine.

De Montreuil-sur-Mer à Paris

Fantine naît à Montreuil-sur-Mer sous le Directoire. Sans nom de famille, ni nom de baptême (rappelons que le misérable, le pauvre, est celui qui est avant tout dépourvu d’identité), elle est née de parents inconnus et a grandi dans la rue, parmi les enfants trouvés. C’est à un passant qu’elle doit le surnom de « la petite Fantine », surnom qui lui est resté.

A l’âge de dix ans, Fantine quitte Montreuil pour travailler chez des fermiers, chez qui elle restera jusqu’à ses quinze ans, avant de s’enfuir pour Paris. Si Victor Hugo passe sous silence les années passées à la ferme, on peut aisément imaginer que son logeur ait tenté d’abuser d’elle. Fantine arrive donc à Paris à l’âge de quinze ans avec l’énergie du désespoir.

Fantine et les garçons !

Devenue ouvrière, petite main dans une usine de couture, elle se fait trois amies, Favourite, Dahlia et Zéphine. La bande constituée, les quatre jeunes filles, dans une équation parfaite, rencontrent quatre jeunes étudiants, originaires du Sud-Ouest. Il y a Listolier, de Cahors, Fameuil de Limoges, Blachevelle de Montauban, et Tholomyès de Toulouse.

Comme par magie, Blachevelle tombe amoureux de Favourite, Listolier de Dahlia, et Fameuil de Joséphine. Les trois jeunes femmes s’amusent, mais Fantine, elle, est un cœur pur, qui se préserve pour le grand amour. Ce dernier se présente sous l’apparence de Félix Tholomyès, le plus beau, le plus distingué de la bande. Fantine n’en revient pas d’être ainsi choisie, et ne voit pas les nombreux défauts de son soupirant.

Félix Tholomyès ou le cuistre doublé d’un imbécile

Âgé de trente ans, Tholomyès, toujours étudiant, essaye péniblement d’écrire mais n’y arrive pas. Alors que notre brave Fantine se crève à la tâche à l’usine, ce personnage veule et inconsistant profite de la naïveté de sa maîtresse qui voit en lui le talent que la France entière va lui envier, et l’entretiendrait presque avec son maigre salaire. Certes, il mène sa bande à la baguette, mais quoi de plus facile que de régner sur des imbéciles ?

L’idylle entre Fantine et Tholomyès durera deux ans. Le coup de théâtre surviendra avec une rupture en bonne et due forme sur laquelle nous reviendrons dans un prochain article. Lorsque Tholomyès s’en va, Fantine est enceinte, mais elle ne lui a encore rien dit. L’on connaît la suite de l’histoire. « L’infortunée se fit fille publique ».

Vous souhaitez en savoir plus sur Les Misérables ? Découvrez La première fois que Bérénice vit Aurélien, elle le trouva franchement con, de Sarah Sauquet aux éditions Eyrolles

Illustration : Anne Hathaway dans le rôle de Fantine dans le film Les Misérables de Tom Hooper, 2012