Hélène est un des personnages fondamentaux de la littérature et de la culture occidentales et son histoire, et son image, n’ont eu de cesse d’être réinterprétées au fil des âges. Hélène symbolise la femme qu’on emmène, qu’on arrache à sa terre.
Hélène, entre Pâris et Ménélas
Tout commence avec la mythologie grecque. Hélène de Troie, fille de Zeus et de Léda, sœur de Clytemnestre et de Castor et Pollux, est réputée pour sa beauté légendaire. Mariée au roi de Sparte Ménélas, elle est enlevée par Pâris, prince troyen. Cet enlèvement est bien à l’origine de la guerre de Troie.
Le personnage d’Hélène est donc lié à la question de la culpabilité :
- si Hélène a suivi Pâris de son plein gré, elle est donc responsable d’un conflit.
- si elle a été forcée de suivre Pâris, et donc véritablement enlevée, Hélène est un butin de guerre, un facteur déclencheur du conflit.
La question de la culpabilité d’Hélène hante toute la culture occidentale, et certains auteurs réhabilitent Hélène tandis que d’autres la condamnent. Plus on va vers une interprétation humaine de l’Histoire, et détachée des divinités, plus Hélène est coupable et responsable de ses choix, puisque non soumise à l’influence divine.
Hélène, belle et magicienne
Dans Tout est bien qui finit bien, Shakespeare met en scène une Hélène magicienne et réputée pour sa grande beauté.Très amoureuse de Bertrand, qui contrairement à elle est de noble extraction, elle se sert de ses pouvoirs pour l’épouser contre son gré.
Hélène de Surgères, la muse cruelle de Ronsard
Au XVIième siècle, Ronsard, dans ses Sonnets pour Hélène comme dans Les Amours condamne Hélène de Troie, et avec toutes les Hélène et notamment sa muse, Hélène de Surgères.
Dans le célébrissime « Sonnet pour Hélène », Ronsard décrit une Hélène orgueilleuse et vieillissante (« Quand vous serez bien vieille, au soir, à la chandelle, ») à qui il conseille de cueillir « dès aujourd’hui les roses de la vie ». C’est à Hélène de Surgères qu’il s’adresse.
Hélène réhabilitée ?
Au XIXième siècle et au tout début du XXième siècle, à une époque où le poème est court, où l’on ne cherche pas nécessairement à argumenter, Hélène est réhabilitée. Paul Valéry et le poète Yeats voient en Hélène une idée abstraite de la beauté. Les auteurs reprennent la scène inaugurale de L’Illiade dans laquelle Homère nous représente Hélène marchant sur les remparts.
Hélène et puis c’est tout !
Au XXième siècle, on note un refus très net de condamner Hélène ou même de l’excuser. Hélène est, par excellence, et cette existence n’est en aucun cas commentée ou justifiée.
Dans la pièce Protée, Paul Claudel met en scène une Hélène assez inconsistante. De retour de Troie en compagnie d’un Ménélas victorieux, elle doit faire face à la nymphe Brindosier qui déclare être la véritable Hélène, la Hélène que rapportant Ménélas étant une doublure !
Dans La Guerre de Troie n’aura pas lieu, Giraudoux, quant à lui, met en scène une Hélène terriblement lucide, porteuse de vérité. C’est Hélène qui sait que la guerre de Troie aura bien lieu et Hélène incarne donc une sorte de Pythie grecque.
Hélène et les Garçons !
Vous l’aurez compris, le personnage d’Hélène est, quelles que soient les époques, associé à l’idée d’une grande beauté. C’est une séductrice, peut-être malgré elle, liée au déclenchement d’un conflit. Est-ce un personnage égoïste ou au contrairement humble et profondément sacrificiel ? C’est aux lecteurs d’en décider ! Sur le plan de la mythologie, Hélène est la figure qui permettait aux Grecs de réfléchir sur la morale et l’immoralité.
Hélène et Héllène
Pour conclure, il est amusant de constater que le mot « héllène », nom et adjectif, désigne les personnes qui vivaient dans la Grèce ancienne, en Hellade. C’est bien sûr ce mot qui a donné l’adjectif « hellénique » qui signifie « relatif à la Grèce ». Le prénom « Hélène », quant à lui, est issu du grec « hêlê »qui signifie « éclat du soleil ». Il ne pouvait être attribuer qu’à une femme éclatante !
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Illustration : Les amours de Pâris et Hélène, Jacques-Louis David