Paris – Athènes : Naissance de la Grèce moderne 1675-1919

2021 marque un double anniversaire : le bicentenaire des débuts de la guerre de Libération de la Grèce, et l’entrée au Louvre de la Vénus de Milo, découverte un an auparavant, en avril 1820.

Pour fêter ce double anniversaire le musée du Louvre vous propose, du 30 septembre 2021 au 7 février 2022, une exposition sur la naissance de la Grèce moderne en tant que nation. Alors que nous sommes nombreux à penser connaître la Grèce, celle-ci demeure assez méconnue. Cette exposition, riche et aux supports multiples, vous fera découvrir des artistes modernes grecs, et, à travers eux, un autre visage de la Grèce.

L’exposition est organisée de façon chronologique, autour d’un fil rouge : les liens diplomatiques et culturels entre la France et la Grèce moderne, par-delà la fascination de la France pour la Grèce antique. Il est notamment question du  philhellénisme, mouvement pour l’indépendance de la Grèce.

L’exposition commence en 1675, à Athènes, et s’achève en 1919 à Paris. Elle est organisée en cinq grandes étapes.

I) La Grèce, une province de l’Empire ottoman

Dès le XVIe siècle, la France instaure des liens diplomatiques avec l’Empire ottoman et ses sultans. La perception française de la Grèce est alors celle d’une province un peu endormie de l’Empire. En 1675, l’ambassadeur de Louis XIV dans l’Empire ottoman est le marquis de Nointel. L’exposition s’ouvre avec un tableau de l’ambassade du marquis.

Cette province quelque peu endormie de l’Empire ottoman a une particularité : ses habitants sont de confession orthodoxe. La première partie de l’exposition rappelle donc  la force de cette identité chrétienne orthodoxe grâce à un rassemblement exceptionnel d’icônes byzantines de la fin du XVe siècle jusqu’au XIXe siècle. Par la Crète et par les Îles Ioniennes, la peinture d’icônes est perméable aux influences occidentales. Cette première partie permet donc de comprendre que la culture grecque repose à la fois sur l’héritage de l’Antiquité, et sur celui de la culture orthodoxe et byzantine.

II) La guerre d’indépendance grecque (1821-1832)

En 1821, la guerre d’indépendance grecque, soutenue militairement et financièrement par plusieurs pays européens, suscite un enthousiasme populaire. Le philhellénisme est un mouvement d’opinion international. Libérée en 1829, la Grèce proclame Athènes comme capitale en 1834, mais continue sa lutte contre l’Empire ottoman.

En 1826, nous sommes à un moment critique de la guerre. Missolonghi est prise par les Ottomans, la population est massacrée et déportée. A Paris, à la galerie Lebrun, une vente d’œuvres est organisée au profit des Grecs. Cette deuxième partie de l’exposition rassemble les œuvres présentées, et met en exergue l’engagement des intellectuels (parmi lesquels Victor Hugo, Chateaubriand, Berlioz, ou Lord Byron) envers le philhellénisme.

Eugène Delacroix, La Grèce sur les ruines de Missolonghi, vers 1863

Cette mobilisation pour la Grèce est l’occasion d’un nouveau tournant dans l’exploration archéologique ; et plusieurs vestiges archéologiques dénichés à Milo sont présentés. C’est d’ailleurs à ce moment précis que la Vénus de Milo est découverte et acquise légalement par l’ambassadeur de France.

Après la libération du Péloponnèse par l’armée française, la France envoie des missions scientifiques (botanistes, spécialistes, architectes) avec l’idée de recenser tout ce que l’on sait sur la culture grecque. Plusieurs traces de ces expéditions sont également à découvrir dans cette partie de l’exposition.

III) Athènes, capitale culturelle d’un nouvel état ou l’invention d’une nation

En 1834, alors qu’Athènes est une toute petite ville, pour ne pas dire un village ottoman, elle est choisie pour être capitale. Les puissances internationales qui ont œuvré pour l’indépendance, la France, la Russie et le Royaume-Uni, désignent un souverain pour la Grèce. Othon Ier de Grèce, fils cadet du roi de Bavière, règne de 1833 à 1862.

Des artistes munichois accompagnent le roi et créent l’architecture d’Athènes. Athènes devient, sur le plan architectural, une nouvelle Munich, et le nouvel État grec construit son identité culturelle moderne en puisant aux sources du néoclassicisme français et allemand.

Des peintres, sculpteurs et artistes grecs sont envoyés à Munich pour se former – on parle d’une école de Munich –  et vous pourrez découvrir le travail de ces artistes au cours de cette troisième étape. Des costumes et photographies racontent également ce moment de l’histoire grecque où il a fallu tout construire et inventer. Le musée Benaki, musée d’art et d’histoire de la Grèce fondé à Athènes a notamment prêté des costumes nationaux et de cour, comme celui de la princesse Marie Bonaparte.

Habit de cour de Marie Bonaparte

IV) Les grandes fouilles

La quatrième étape de cette exposition est la plus spectaculaire. Elle présente plusieurs pièces des collections des musées archéologiques de Delphes et de Délos – les fouilles sur ces deux sites ont lieu dans la deuxième moitié du XIXe siècle. Ces sites antiques attestent toujours aujourd’hui des liens durables entre les deux pays, car la France continue d’y travailler.

L’École française d’archéologie est créée en 1846 à Athènes, par Louis-Philippe, à l’origine avec la volonté de diffuser la langue française. La création de cette École, et par la suite celle des autres instituts archéologiques, encourage le développement de cette discipline scientifique. Les premières fouilles de l’École, en 1870 à Santorin, mettent au jour une histoire inconnue de la Grèce et ces vestiges constituent une source d’inspiration pour les artistes grecs modernes.

Alfred-Nicolas Normand, Athènes, L’Arc d’Hadrien et l’Acropole en 1852

V) Artistes grecs à Paris

Dans la seconde partie du XIXe siècle, le centre artistique européen se déplace de Munich à Paris, et les artistes grecs sont de plus en plus nombreux à aller étudier dans la capitale française.

La cinquième et dernière section de l’exposition est consacrée aux artistes grecs à Paris, et témoigne des différences entre les écoles munichoises et parisiennes. Ont été rassemblés et reconstitués le pavillon de la Grèce à l’exposition universelle de Paris de 1889 et celui du pavillon de la Grèce à l’exposition de 1900. L’architecture de ces deux pavillons montre qu’en dix ans, la Grèce est passée d’une revendication de l’héritage antique à une revendication de l’héritage byzantin, avec la volonté de recouvrer Constantinople comme capitale de l’état grec.

Vous découvrirez de grands noms de la peinture grecque comme Iakovos Rizos, qui travaille et meurt  à Paris. Son tableau Soirée Athénienne, qui a été choisi pour figurer sur les affiches de l’exposition du Louvre, est fortement influencé par l’Art nouveau et la Belle Époque parisienne.

Paris – Athènes : Naissance de la Grèce moderne 1675-1919, c’est une exposition à découvrir au musée du Louvre, du 30 septembre 2021 au 7 février 2022.

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Ces écrivains classiques qui m’ont fait viscéralement aimer la France

J’ai eu la chance de voyager à l’étranger, mais je n’aime rien tant que voyager en France, et c’est à la littérature que je dois ma découverte et mon amour des provinces et territoires.
J’ai découvert Limoges et Barbezieux grâce à Jacques Chardonne, la Touraine et l’Anjou grâce à Rabelais et aux poètes de La Pléiade, le Berry avec George Sand et Clermont-Ferrand grâce à Alexandre Vialatte.
J’adore découvrir une ville que je ne connais pas, je suis curieuse des industries, traditions et agricultures qui font vivre, de la petite Histoire derrière la Grande, de cette France profonde dont le silence me bouleverse. J’aime discuter avec les commerçants que je croise, et ai une admiration forte pour ces bouchers et boulangers qui maintiennent des villages en vie. Je garde le souvenir d’une rencontre, alors que j’étais à Brantôme avec mes grands-parents, avec un boucher qui ne trouvait aucun repreneur pour sa très belle et prospère boutique.
Je suis née à Paris et viscéralement citadine, et je serais peut-être malheureuse si je vivais dans un territoire isolé. Néanmoins, je me demande souvent ce que peut signifier de grandir dans des régions où le silence et l’attente sont rois, dans des zones blanches, dans des lieux où rien n’est accessible sans permis. Il faut sûrement de la résilience et du courage, et je suis sensible et reconnaissante envers les initiatives culturelles qui naissent en zones rurales.
Bien sûr certains paysages me bouleversent plus que d’autres et mes émotions les plus fortes sont familiales. J’aime la lumière sur les remparts d’Angoulême, les tours de La Rochelle, les ruelles de Poitiers, ou le miroir d’eau de Bordeaux.
J’ai beaucoup appris sur la France en lisant des auteurs réalistes comme Balzac ou Maupassant, mais j’aime aussi des écrivains oubliés qui ont célébré leurs, ou des, territoires : je pense à Eugène Fromentin et la Charente-Maritime, Marseille racontée par André Suarès, les Ardennes par André Dhôtel, la Sologne par Maurice Genevoix. J’aime ces écrivains qui savent décrire une ville saisie dans sa pesanteur bourgeoise, une terre grasse et gonflée d’eau, ou alors sèche rocailleuse, les feuilles d’arbres craquant sous nos pas, ou des poneys sauvages traversant une clairière au petit matin. Je crois que leur attention aux choses de la vie fait leur authenticité, que leur humilité devant la nature fait leur légitimité. J’aime les nuances imperceptibles qu’ils décrivent, et lorsque je traverse la France, c’est à Louis Pergaud, Marcel Aymé, Marcel Pagnol ou à Eugène Le Roy que je pense.