Les appartements parisiens emblématiques de la littérature classique

Bientôt les vacances d’été, et peut-être, à l’horizon, une escapade parisienne. Nous vous emmenons à la découverte des plus beaux appartements parisiens de la littérature classique !

Un hôtel particulier avec le charme de l’ancien et des prestations de luxe : bienvenue chez Nana

Situé au coin de l’avenue de Villiers et de la rue Cardinet, cet hôtel particulier saura vous séduire par ses nombreuses prestations et sa riche collection d’œuvres d’art et de bibelots. A proximité des Champs-Elysées et du parc Monceau,  cet havre de paix constitue la promesse d’un séjour exceptionnel.

« L’hôtel de Nana se trouvait avenue de Villiers, à l’encoignure de la rue Cardinet, dans ce quartier de luxe, en train de pousser au milieu des terrains vagues de l’ancienne plaine Monceau. Bâti par un jeune peintre, grisé d’un premier succès et qui avait dû le revendre à peine les plâtres essuyés, il était de style renaissance, avec un air de palais, une fantaisie de distribution intérieure, des commodités modernes dans un cadre d’une originalité voulue. Le comte Muffat avait acheté l’hôtel tout meublé, empli d’un monde de bibelots, de fort belles tentures d’Orient, de vieilles crédences, de grands fauteuils Louis XIII ; et Nana était ainsi tombée sur un fonds de mobilier artistique, d’un choix très fin, dans le tohu-bohu des époques. »[1]

Le cachet de l’ancien dans un vaste appartement à Saint-Sulpice : bienvenue chez  Porthos

Porte cochère et magnifique cour intérieure, poutres apparentes, matériaux nobles, nombreuses chambres et commodités ainsi que clarté : l’appartement de Porthos promet un séjour mémorable, et il est idéalement situé entre Saint-Germain-des-prés et Odéon.

« Porthos habitait un appartement très vaste et d’une très somptueuse apparence, rue du Vieux-Colombier. Chaque fois qu’il passait avec quelque ami devant ses fenêtres, à l’une desquelles Mousqueton se tenait toujours en grande livrée, Porthos levait la tête et la main et disait : Voilà ma demeure ! »[2]

Un hôtel particulier pour abriter des célébrités en toute discrétion : bienvenue chez le comte de Monte-Cristo

Situé au 30 avenue des Champs-Elysées, la demeure parisienne d’Edmond Dantès est un hôtel particulier aux prestations luxueuses.  Entouré de massifs de verdure, et d’une deuxième entrée, dissimulée, elle constitue une parfaite parade aux indiscrets.

« La maison choisie par Ali, et qui devait servir de résidence de ville à Monte-Cristo était située à droite en montant les Champs-Elysées, placée entre cour et jardin ; un massif fort touffu, qui s’élevait au milieu de la cour, masquait une partie de la façade ; autour de ce massif s’avançaient, pareilles à deux bras, deux allées qui, s’étendant à droite et à gauche, amenaient à partir de la grille les voitures à un double perron supportant à chaque marche un vase de porcelaine plein de fleurs. Cette maison, isolée au milieu d’un large espace, avait, outre l’entrée principale, une autre entrée donnant sur la rue de Ponthieu. »[3]

Un petit deux-pièces sur les grands boulevards pour profiter des sorties parisiennes : bienvenue chez Georges Duroy

Cet appartement situé au 127 rue de Constantinople se trouve non loin des quartiers Opéra et Saint-Lazare, non loin de nombreux théâtres, restaurants et cafés. Ce logement modeste (un  deux-pièces situé au rez-de-chaussée, en face de la loge de la gardienne) constitue le logement idéal pour un court séjour en amoureux.

« Le salon, tapissé de papier ramagé, assez frais, possédait un meuble d’acajou recouvert en reps verdâtre à dessins jaunes, et un maigre tapis à fleurs, si mince que le pied sentait le bois par-dessous.  La chambre à coucher était si exiguë que le lit l’emplissait aux trois quarts. Il tenait le fond, allant d’un mur  à l’autre, un grand lit de maison meublée, enveloppé de rideaux bleus et lourds, également en reps, et écrasé sous un édredon de soie rouge maculé de tâches suspectes. »[4]

Un appartement bourgeois-bohème idéalement situé sur l’île Saint-Louis : bienvenue chez Charles Swann

Cet hôtel particulier légèrement défraîchi et à la superficie modeste a une vue magnifique sur la Seine, puisqu’il est situé quai d’Orléans, en plein cœur de Paris. Il a le charme des commodités vintage et bénéficie d’une somptueuse bibliothèque et d’un cabinet de curiosités. Il constitue un parfait témoignage de l’art de vivre à la française.

« Il demeurait maintenant dans un vieil hôtel où il installait ses collections et que ma grand-mère rêvait de visiter, mais qui était situé quai d’Orléans, quartier que ma grand-mère trouvait infâme d’habiter… »[5]

Un trois-pièces en face du Luxembourg pour profiter du quartier Saint-Michel : bienvenue chez Athos

L’appartement de notre mousquetaire ombrageux est situé dans le sixième arrondissement de Paris, non loin de l’Odéon.

« Athos habitait rue Férou, à deux pas du Luxembourg ; son appartement se composait de deux petites chambres, fort proprement meublées, dans une maison garnie dont l’hôtesse encore jeune et véritablement encore belle lui faisait inutilement les doux yeux. Quelques fragments d’une grande splendeur passée éclataient ça et là aux murailles de ce modeste logement ; »[6]

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Illustration : Owen Wilson et Rachel McAdams dans Midnight in Paris de Woody Allen (2011)

[1] Emile Zola, Nana, 1880

[2] Alexandre Dumas, Les Trois Mousquetaires, « L’intérieur des mousquetaires », 1844

[3] Alexandre Dumas, Le Comte de Monte-Cristo, 1844

[4] Guy de Maupassant, Bel-Ami, 1885

[5] Marcel Proust, Du côté de chez Swann, 1913

[6] Alexandre Dumas, Les Trois Mousquetaires, « L’intérieur des mousquetaires », 1844

Qui sont Aucassin et Nicolette, les Roméo et Juliette de la littérature française ?

Plus émouvants que Tristan et Iseult, plus attendrissants que Manon Lescaut et Des Grieux, plus charnels que Roméo et Juliette, Aucassin et Nicolette forment LE grand couple de la littérature amoureuse ! Injustement oubliés, nous avons décidé de les mettre en lumière et de vous les présenter comme il se doit !

Des héros du XIIIe siècle

Écrit dans une langue simple et magnifique, Aucassin et Nicolette est un texte français du XIIIe siècle, plus précisément une « chantefable », alternant passages en prose et vers destinés à être chantés. L’œuvre raconte l’amour pur et impossible que se portent deux adolescents qu’a priori tout sépare, Aucassin, fils du comte de Beaucaire, et Nicolette, une esclave sarrasine.

Moult péripéties les séparent

Aucassin est issu d’une famille noble. Nicolette, elle, a été vendue à un vassal du comte de Beaucaire, et c’est ainsi qu’elle a rencontré Aucassin. Malgré le fait que Nicolette soit baptisée, son union avec Aucassin serait considérée comme une mésalliance. Dès le début de l’œuvre, Nicolette se retrouve enfermée afin d’être séparée d’Aucassin. Ce dernier sera à son tour enfermé lorsque le comte de Beaucaire réalisera qu’Aucassin ne peut oublier Nicolette. Le suspense de cette chantefable réside dans cette question : les deux jeunes gens réussiront-ils à déjouer l’attention respective de leurs geôliers ?

Des amants plus que touchants

Aucassin et Nicolette frappe par la simplicité de ses propos. Ainsi, Aucassin évoque longuement sa bien-aimée, et son souhait le plus cher, la retrouver : « Je ne désire pas y entrer, mais je veux avoir Nicolette, ma très douce amie que j’aime tant. […] Mais c’est en enfer que je veux aller, car là vont les beaux clercs et les beaux chevaliers qui sont morts dans les tournois et les grandes guerres, les bons soldats et les nobles. […] Moi, je veux aller avec eux, pourvu que j’aie avec moi Nicolette, ma très douce amie. »[1]

Aucassin apparaît comme un sensible jouvenceau, qui pleure de ne pas avoir Nicolette à ses côtés :

« Nicolette, fleur de lis,

douce amie au clair visage

 tu es plus douce que le raisin

ou qu’une tranche de pain trempée dans un hanap. »[2]

Ces vers pourraient ressembler à de la poésie d’adolescents du XXIème siècle, mais non, c’est une chantefable du XIIIème siècle !

Une fin heureuse qui fait du bien !

Loin de nous l’idée de vouloir vous gâcher votre plaisir, mais on doit vous le dire : Aucassin et Nicolette finiront par se retrouver ! Et ça fait du bien, et ça réchauffe le cœur, et c’est encore mieux que la meilleure des énièmes comédies romantiques ! La chantefable s’achève sur une déclaration des plus touchantes et adorables qui ferait pleurer le moindre cœur de pierre.

Nous vous en livrons un tout petit extrait :

« Aucassin, cher et doux ami, dans quel pays irons-nous ?

– Douce amie, je ne sais pas.

Peu m’importe que nous allions

en forêt ou dans des lieux écartés,

pourvu que je sois avec vous. »[3]

Une œuvre auréolée de mystères

Si vous éprouviez encore quelques doutes à vous plonger dans ce court chef-d’œuvre que vous serez, à n’en pas douter, fiers de connaître, quelques informations supplémentaires :

  • nous ne savons pas qui est l’auteur d’Aucassin et Nicolette même si les médiévistes pensent que l’auteur serait peut-être originaire de Picardie, ou d’Artois…
  • c’est le seul exemple avéré de « chantefable », de texte mêlant vers et prose, les vers étant probablement destinés à être chantés. Le mot aurait été inventé par l’auteur…

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Illustration : Enluminure Chasse au faucon au Moyen Âge

 

[1] Anonyme, XIIIème siècle, Aucassin et Nicolette

[2] Anonyme, XIIIème siècle, Aucassin et Nicolette

[3] Anonyme, XIIIème siècle, Aucassin et Nicolette