Quels classiques pour vos enfants ? « Ils étaient dix », « Le Crime de l’Orient-Express » et « Mort sur le Nil » d’Agatha Christie

Il m’arrive, chaque année, de croiser des collégiens et lycéens qui n’ont jamais lu Ils étaient dix d’Agatha Christie, et j’en suis  toujours étonnée. Persuadée que Ils étaient dix est un incontournable, un chef-d’œuvre absolu du roman policier, il m’apparaît comme une lecture idéale dès la classe de sixième. Il s’agit d’un roman court, accessible, au suspense très bien mené, dans lequel il est extrêmement facile de rentrer et qu’on ne lâche plus. Il fait consensus auprès des élèves qui l’ont lu, et constitue une introduction idéale au genre du roman policier, que l’on étudie souvent au collège.

Je vous présenterai donc, dans cet article, trois romans d’Agatha Christie, Ils étaient dix, Le Crime de l’Orient-Express et Mort sur le Nil.

Ils étaient dix (Dix Petits Nègres), 1939

Roman le plus célèbre d’Agatha Christie, Ils étaient dix met en scène dix personnages qui ne se connaissent ni d’Ève ni d’Adam et se retrouvent tous sur l’île du Nègre, dans le Devon, invités par M. et Mme Owen, qu’ils n’ont jamais rencontrés. Le début du roman présente chacun des protagonistes de façon individuelle, séparée, et Agatha Christie excelle dans le portrait psychologique de chacune de ces personnalités, qui peinent à se remémorer leurs lien avec celui ou celle qui les a invités.

Il y a là l’intranquille Véra Elisabeth Claythorne, les austères Emily Brent et Lawrence John Wargrave, l’inconséquent Anthony Marston, l’impulsif Philip Lombard, etc. Ils sont dix. La demeure qui les accueille est grande, luxueuse, et dans chacune des chambres se trouve au mur une comptine, celle des Dix Petits Nègres, qui disparaissent les uns après les autres.

Le premier soir, les dix convives se retrouvent à dîner et s’étonnent de l’absence de leurs hôtes. C’est alors que, dans la salle à manger, une voix retentit émanant d’un tourne-disque. Les invités, ainsi que les domestiques, sont accusés d’un crime. Tous sont amenés à révéler qui ils sont, et le motif de leur présence sur l’île. C’est alors que l’un d’entre eux décède subitement, comme dans la première phrase de la comptine : « Dix Petits Nègres s’en allèrent dîner. L’un d’eux étouffa et il n’en resta plus que Neuf ».

Le roman se transforme en un étouffant huis clos, d’autant plus fascinant qu’il a pour décor la nature sauvage du Devon.

Le Crime de l’Orient-Express, 1934

Pourquoi ce titre ?

Roman à l’intrigue cosmopolite et aux allures de pièces de théâtre, Le Crime de l’Orient-Express est plus exigeant que Dix Petits Nègres. Il joue avec la chronologie et repose sur des personnages complexes, qui à la fois incarnent et dépassent les stéréotypes qui leur ont été attribués. C’est un roman passionnant, au dénouement étonnant, qui dépasse les enjeux d’un « simple » roman policier pour nous offrir un vrai message de paix et de fraternité.

© Le Crime de l’Orient-Express, Kenneth Branagh, 2017

L’intrigue

Hercule Poirot, détective belge, vient de passer plusieurs jours en Syrie. Sommé de rentrer à Londres pour une affaire de la plus haute importance, Hercule Poirot tente de réserver un billet à bord de l’Orient-Express. Toutes les places sont réservées, ce qui est extrêmement inhabituel, mais Poirot réussit tout de même à obtenir une place grâce à un vieil ami. Le détective s’apprête donc à passer plusieurs jours dans ce fameux train, à bord duquel il pourra apprécier les plaisirs et le luxe des voyages ferroviaires, mais aussi subir les inconvénients qui en découlent. Le train est effectivement bondé et peuplé de passagers aux nationalités et profils très variés. Après une nuit très agitée, où le train était immobilisé – les neiges yougoslaves ont contraint l’Orient-Express à s’arrêter – on découvre le cadavre d’un Américain lardé de douze coups de couteau. Cet homme s’appelle Samuel Ratchett, et on confie vite l’affaire à Poirot. L’intrigue va s’avérer passionnante pour le détective belge car l’assassin n’a pas pu intervenir de l’extérieur : voilà donc un véritable huis clos…

Mort sur le Nil, 1937

Pourquoi ce titre ?

Alors que Dix Petits Nègres et Le Crime de l’Orient-Express s’inscrivent dans des ambiances aux couleurs résolument froides, Mort sur le Nil est un roman presque chaud et lumineux, qui aurait la morsure d’un soleil estival. Si sa structure me paraît moins complexe que celle du crime de l’Orient-Express, son intrigue repose sur un triangle amoureux dont tous les enjeux psychologiques pourraient échapper aux plus jeunes. Il est presque émouvant dans son évocation  du sentiment amoureux, et il offre de très beaux portraits de femmes.

© Mort sur le Nil, John Guillermin, 1978

L’intrigue

Les principaux protagonistes de Mort sur le Nil sont Linnet Ridgeway, Simon Doyle et Jacqueline de Bellefort. Linnet Ridgeway est une riche héritière qui a tout pour elle. Sa plus vieille amie est Jacqueline de Bellefort, une fantasque et attachante jeune femme à qui la vie ne sourit pas autant qu’à Linnet. Bien que déséquilibrée et empreinte de paternalisme, leur amitié n’en demeure pas moins solide.

Tout bascule le jour où Linnet pique à Jacqueline son fiancé, et choisit de l’épouser. Linnet et Simon partent en voyages de noces en Égypte où ils sont suivis et harcelés par Jacqueline. Linnet et Simon rencontrent Hercule Poirot. Linnet se plaint auprès du détective privé d’être harcelé par Jacqueline, mais ce dernier lui conseille de répondre de ses actes, pressentant une issue dramatique à ce drame amoureux. Alors que le voyage se poursuit sur le Nil, à bord du bateau à vapeur S.S. Karnak…, Linnet est retrouvée assassinée. Mais Jacqueline a un alibi inattaquable…

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Vous recherchez d’autres conseils pour vos enfants ? Découvrez notre article consacré à La Gloire de mon père et au Château de ma mère de Marcel Pagnol.

© Ils étaient dix, Sarah Phelps, 2015

© Le Crime de l’Orient-Express, Kenneth Branagh, 2017

© Mort sur le Nil, John Guillermin, 1978

 

 

 

Quels classiques pour vos enfants ? « La Gloire de mon père » et « Le Château de ma mère »

En cette période où vous devez peut-être jongler entre l’école à la maison et le (difficile) maintien du télétravail, j’ai décidé de vous présenter régulièrement des classiques qui me semblent idéaux pour de jeunes enfants, et je commence aujourd’hui par les premiers classiques que j’ai lus, grâce auxquels j’ai véritablement attrapé le virus de la lecture. Il s’agit de La Gloire de mon père et du Château de ma mère.

L’édition dans laquelle je les ai lus, et les lis encore aujourd’hui, est celle que ma mère m’a offerte étant enfant. France Loisirs avait réédité tout Marcel Pagnol à l’occasion de la sortie des films d’Yves Robert. Nous étions en 1990, j’avais 7 ans, et ces deux films, découverts avant les livres, furent un véritable choc. Encore aujourd’hui, je ne peux entendre la voix de Jean-Pierre Darras ni entendre les cigales de la musique de Vladimir Cosma sans avoir les larmes aux yeux. Ma mère m’offrit donc ces deux livres quelques semaines après. Ils me marquèrent assez pour qu’un an plus tard, en CM1, alors que Mme Pimond, ma maîtresse, commençait la dictée, je levai la main et reconnus, rien qu’à une seule phrase, La Gloire de mon père. Je le connaissais par cœur.

Pourquoi lire et faire lire La Gloire de mon père et Le Château de ma mère à vos enfants ?

De manière très simple, La Gloire de mon père et Le Château de ma mère sont une évocation subtile, émouvante, de l’enfance, du lien que nous entretenons avec nos parents, avec notre histoire familiale, mais aussi avec un territoire. Pagnol sait se mettre aussi bien à hauteur d’enfant que d’adulte, et cette alternance de point de vue fait tout l’humour et toute la sensibilité de ces récits. Il nous emmène dans les collines et conjugue le quotidien sur le mode de l’aventure éternelle. Tout est voyage, tout est découverte avec Marcel. L’aventure est en bas de chez nous, et il nous suffit d’ouvrir grand notre porte, notre cœur, ou un album des Pieds Nickelés, pour en prendre la mesure. Lire Pagnol avec ses enfants, c’est tisser un lien entre les générations, l’occasion de revenir dans cette ville au loin perdue où vous avez passé votre enfance, et d’évoquer, avec eux, vos propres souvenirs d’enfance !

Plonger dans les souvenirs d’enfance de Marcel Pagnol, c’est aussi le plaisir d’une langue raffinée et accessible, à l’image d’un petit garçon d’une nature rêveuse, qui a la passion des mots, et qui est curieux du monde des adultes. Même dans l’évocation des choses les plus simples de la vie, la langue de Pagnol se fait toujours poétique. Elle est chantante et gaie, quand elle ne se fait pas bouleversante, et c’est une façon très habile d’enrichir le lexique de vos enfants.

Enfin, et le plus important surtout, La Gloire de mon père, plus encore que Le Château de ma mère,  est une ode à la liberté. Désireux d’embrasser et de conquérir l’immense, superbe et inviolé territoire que sont les collines et dont il est tombé éperdument amoureux, Marcel, dont Robinson Crusoé est le héros préféré, fait l’expérience d’une symbiose entre un paysage et un âge de la vie. Tout à la revendication d’une patrie choisie, Pagnol nous rappelle ainsi que les premières amours sont souvent géographiques. Et que même enfermé, il ne convient qu’à nous, par la lecture, et par l’esprit, de parvenir à s’évader.

À partir de quel âge ?

Dès le CM2 pour de bons lecteurs, idéal dès la classe de cinquième.

Vous cherchez d’autres idées de lecture pour vos enfants ? Pourquoi ne pas leur faire découvrir Les quatre filles du docteur March de Louisa May Alcott, les romans d’Agatha Christie, Le Mystère de la chambre jaune de Gaston Leroux ?

 

@ Le Château de ma mère, Yves Robert, 1990