Sept héroïnes méconnues de la littérature classique, à découvrir dans « Un prénom d’héroïne et de héros », le dictionnaire des prénoms littéraires

À l’occasion de la journée internationale des droits des femmes, nous avons souhaité vous présenter quelques héroïnes de la littérature classique. Souvent oubliées, parfois issues d’œuvres elles-mêmes oubliées, ces héroïnes frappent, pourtant, par leur courage, leur modernité, et par leur tentative de s’affranchir des règles pour tracer leur propre chemin.

Émilie dans Cinna, Pierre Corneille, 1641

Héroïne passionnée et déterminée, devant laquelle les hommes s’inclinent, Émilie complote contre l’empereur Auguste qu’elle souhaite voir mort, pour avoir tué son propre père. Elle est amoureuse de Cinna.

Hortense dans Le Petit-Maître corrigé de Marivaux, 1734

Aussi belle que brillante, Hortense, en sa qualité de fille de comte, est promise au marquis Rosimond. Si ce dernier pense l’affaire conclue la jeune fille à peine rencontrée, Hortense frappe Rosimond par sa force de caractère, son refus des conventions et son exigence envers elle-même comme envers les autres. Horripilée par un fiancé qui la prend pour une oie blanche, Hortense annonce la couleur : si Rosimond ne se corrige pas, Hortense fera annuler le mariage !

Eugénie Danglars dans Le Comte de Monte-Cristo, Alexandre Dumas, 1844

Âgée de dix-sept ans, Eugénie Danglars, est un électron libre mû par l’amour de l’art, qui ne rêve que de devenir cantatrice et de se soustraire aux rêves de mariage que son père, le baron Danglars, forme pour elle. Amoureuse de son professeur de musique, la jeune et jolie Louise d’Armilly, Eugénie stupéfait son entourage par son aplomb et son esprit d’initiative. Elle est capable de tous les risques pour vivre la vie qu’elle s’est imaginée.

Aurore de Lautenbourg-Detmold dans Kœnigsmark, Pierre Benoit, 1918

Fille d’un fantasque prince mongol, Aurore de Lautenbourg-Detmold est une princesse qui ensorcèle tout son peuple se distingue par une surprenante alchimie avec la nature. Chasseuse hors-pair capable de recueillir entre ses mains et de baiser l’oiseau qu’elle vient de tuer, Aurore est aussi une excellente cavalière, un « Murat androgyne », à laquelle son cheval fougueux, nommé Tarass Boulba, est entièrement soumis.

Julie Gamelin dans Les dieux ont soif, Anatole France, 1912

Sous la Terreur, Julie Gamelin est une ancienne ouvrière des modes qui a été enlevée et emmenée à Londres par son fiancé, Fortuné de Chassagne. Lorsque les amants reviennent à Paris, Fortuné, noble, est emprisonné sous la Terreur par le Tribunal révolutionnaire. Julie, hardie, aventureuse et prête à tout pour faire libérer son amant, se déguise en commis drapier, et pénètre les milieux interlopes du Tribunal révolutionnaire.

Clara Zetkin dans Les Cloches de Bâle, Louis Aragon, 1934

Âgée d’une cinquantaine d’années, Clara Zetkin est une militante allemande qui fait son apparition lors du congrès socialiste de Bâle, en 1912 où elle prend la parole « au nom de toutes les femmes socialistes ». Apôtre de la paix et d’une solidarité à la fois féminine et intemporelle, Clara Zetkin transcende les peuples.

Pélagie LeBlanc dans Pélagie-la-Charrette, Antonine Maillet, 1979

Au XVIIIème siècle,  Pélagie LeBlanc, âgée de 20 ans, subit le traumatisme du Grand Dérangement  et est déportée en Géorgie, où elle devient esclave dans les champs de coton. Après quinze années de servitude, Pélagie, hantée par sa terre natale, emmène ses enfants à bord d’une charrette et tente le tout pour le tout pour retrouver sa terre natale. Son infernale odyssée durera dix ans.

Vous souhaitez en savoir plus sur ces héroïnes ? Découvrez Un prénom d’héroïne et de héros, le dictionnaire des prénoms littéraires de Sarah Sauquet dans lequel vous sont présentés 244 prénoms et 400 personnages.

Quels personnages de la littérature participeraient à #VendrediLecture ?

Ah, le #VendrediLecture… Cette grand-messe que les lecteurs connectés, blogueurs, auteurs et éditeurs attendent chaque semaine avec impatience. Parfait baromètre des lectures du moment, ce rendez-vous hebdomadaire donne souvent lieu à de belles (re)découvertes : classiques qu’on croyait oubliés, lectures inavouables que l’on ose revendiquer, sorties récentes, dédicacées, que l’on est fiers d’exhiber… A chacun son #VendrediLecture ! Et si les héros de la littérature avaient pu y participer ? Dis-moi quelle est ta #VendrediLecture, je te dirai qui tu es….

Jane Eyre est fascinée par les Voyages de Gulliver

« Bessie me demanda si je désirais un livre ; le mot livre agit sur moi comme un stimulant passager, et je la priai d’aller chercher les Voyages de Gulliver dans la bibliothèque. C’est un livre que j’avais lu et relu avec délices ; je le regardais comme le récit de choses qui existent réellement, j’y avais trouvé une source d’intérêt plus profonde que dans les contes de fées ; »

Charlotte Brontë, Jane Eyre, chapitre III, 1847

Aurélien est hanté par Bérénice de Racine

« Qu’elle se fût appelée Jeanne ou Marie, il n’y aurait pas repensé, après coup. Mais Bérénice. Drôle de superstition. Voilà bien ce qui l’irritait.

Il y avait un vers de Racine que ça lui remettait dans la tête, un vers qui l’avait hanté pendant la guerre, dans les tranchées, et plus tard démobilisé. Un vers qu’il ne trouvait même pas un beau vers, ou enfin dont la beauté lui semblait douteuse, inexplicable, mais qui l’avait obsédé, qui l’obsédait encore :

Je demeurai longtemps errant dans Césarée…

En général, les vers, lui… Mais celui-ci lui revenait et revenait. Pourquoi ? C’est ce qu’il ne s’expliquait pas. »

Louis Aragon, Aurélien, 1944

Chick lit le cultissime Paradoxe sur le Dégueulis de Jean-Sol Partre

« Bonjour ! dit Chloé…

  • Bonj… Etes-vous arrangée par Duke Ellington ? » demanda Colin… Et puis il s’enfuit, parce qu’il avait la conviction d’avoir dit une stupidité.

Chick le rattrapa par un pan de sa veste.

«  Où vas-tu comme ça ? Tu ne vas pas t’en aller déjà ? Regarde !… »

Il tira de sa poche un petit livre relié en maroquin rouge.

«  C’est l’original du Paradoxe sur le Dégueulis, de Partre…

Boris Vian, L’Ecume des jours, 1947

Gargantua recommande Plutarque, Platon, Pausanias, et Athénée à son fils Pantagruel

« Même les femmes et les filles ont aspiré à cette louange et à cette manne céleste de la bonne science. Si bien qu’à mon âge j’ai été obligé d’apprendre le grec, non que je l’aie méprisé comme Caton, mais je n’avais pas eu la possibilité de l’apprendre en mon jeune âge ; et volontiers je me délecte à lire les Traités moraux de Plutarque, les beaux dialogues de Platon, les Monuments de Pausanias et les Antiquités d’Athénée, en attendant l’heure qu’il plaise à Dieu mon créateur de m’appeler et m’ordonner de sortir de cette terre. »

Rabelais, Pantagruel, chapitre VIII, « Comment Pantagruel, étant à Paris, reçut des lettres de son père Gargantua et la copie de celles-ci », 1532

Dorian Gray parcourt Manon Lescaut de l’abbé Prévost en attendant Lord Henry

« Lord Henry n’était pas encore rentré. Par principe, il était toujours en retard, son principe étant que la ponctualité est une voleuse de temps. Aussi le jeune homme avait-il l’air un peu boudeur, cependant que ses doigts tournaient distraitement les pages richement illustrées d’une édition de Manon Lescaut qu’il avait trouvée dans l’une des bibliothèques. »

Oscar Wilde, Le Portrait de Dorian Gray, chapitre 4, 1890

Julien Sorel dévore le Mémorial de Sainte-Hélène de Las Cases en cachette de son père

« Au lieu de surveiller attentivement l’action de tout le mécanisme, Julien lisait. Rien n’était plus antipathique au vieux Sorel ; il eût peut-être pardonné à Julien sa taille mince, peu propre aux travaux de force, et si différente de celle de ses aînés ; mais cette manie de lecture lui était odieuse, il ne savait pas lire lui-même.

Ce fut en vain qu’il appela Julien deux ou trois fois. L’attention que le jeune homme donnait à son livre, bien plus que le bruit de la scie, l’empêcha d’entendre la terrible voix de son père.[…] À peine Julien fut-il à terre, que le vieux Sorel, le chassant rudement devant lui, le poussa vers la maison. Dieu sait ce qu’il va me faire ! se disait le jeune homme. En passant, il regarda tristement le ruisseau où était tombé son livre ; c’était celui de tous qu’il affectionnait le plus, le  Mémorial de Sainte-Hélène. »

Stendhal, Le Rouge et le Noir, Livre I, Chapitre IV, 1830

Bouvard et Pécuchet lisent Rousseau, Mme de Staël, Benjamin Constant et Claire de Duras

« A haute voix et l’un après l’autre, ils parcoururent La Nouvelle Héloïse, Delphine, Adolphe, Ourika. Mais les bâillements de celui qui écoutait gagnaient son compagnon, dont les mains bientôt laissaient tomber le livre par terre. Ils reprochaient à tous ceux-là de ne rien dire sur le milieu, l’époque, le costume des personnages. Le cœur est traité. Toujours du sentiment ! Comme si le monde ne contenait pas autre chose ! »

Gustave Flaubert, Bouvard et Pécuchet, chapitre 5, 1881

Emma Bovary a été marquée par Paul et Virginie de Bernardin de Saint-Pierre

« Elle avait lu Paul et Virginie et elle avait rêvé la maisonnette de bambous, le nègre Domingo, le chien Fidèle, mais surtout l’amitié douce de quelque bon petit frère, qui va chercher pour vous des fruits rouges dans des grands arbres plus hauts que des clochers, ou qui court pieds nus sur le sable, vous apportant un nid d’oiseau. »

Gustave Flaubert, Madame Bovary,  Première partie, chapitre 6, 1857

Lecture du jour, du moment, lecture qu’ils recommandent  ou qui les a façonnés, nos héros littéraires ont, tous, en eux, un #VendrediLecture. Et vous, quel sera votre #VendrediLecture ? Nous vous souhaitons, en tout cas, une excellente journée !

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Illustration : Claude Jade et Jean-Pierre Léaud dans Domicile conjugal (François Truffaut, 1970)

NB : Paradoxe sur le Dégueulis de Jean-Sol Partre est une allusion de Boris Vian à La Nausée de Jean-Paul Sartre

NB : Pour en savoir plus sur Claire de Duras, l’auteur du roman Ourika : https://fr.wikipedia.org/wiki/Claire_de_Duras